Près de 84 % de réussite pour les handicapés aux examens d’Etat
Le coordonnateur de la Société haïtienne d’aide aux aveugles(SHAA), Michel Péan, a présenté mardi des statistiques impressionnantes ayant trait au taux de réussite des non-voyants aux examens d’Etat, cette année. Qui a dit que les aveugles étaient moins performants que les autres ?
La Société haïtienne d’aide aux aveugles (SHAA) était représentée aux examens officiels d’Etat pour l’année académique 2012-2013 par 32 candidats non-voyants. Sur ces 32 postulants, – 20 garçons et 7 filles ont réussi leurs examens du Bac dès la première session en juillet, soit un taux de 84,37%. Le taux moyen de réussite à l’échelle nationale ne dépasse pas 30% aux examens officiels… Des 5 autres postulants, deux ont participé à la session extraordinaire, les trois autres étant éliminés.
Grâce au soutien de la Christian Blind Mission(CBM), la Société haïtienne d’aide aux aveugles a su honorer ses engagements envers des dizaines de patients. « Le support du CBM était très important pour nous cette année, a-t-il déclaré. Grâce à son aide généreuse, nous avons payé les frais de scolarisation de dizaines d’élèves, payé le salaire de nos deux éducateurs spécialisés et acheté également certains matériels adaptés aux aveugles. »
Dans l’ensemble du pays, en dépit des efforts répétés pour scolariser les handicapés visuels, le taux de scolarisation de cette catégorie de personnes reste très faible, soit 5,18 %, à comparer au taux de scolarisation des personnes non handicapées qui, lui, atteint 78%. Le docteur Péan demande donc à l’Etat haïtien de se pencher davantage sur ces personnes qui constituent une catégorie importante pour le développement du pays. « Notre principale préoccupation à l’heure actuelle, c’est la scolarisation massive des élèves handicapés, dit-il. Et ceci nécessite un apport considérable de l’Etat haïtien.»
Avec son programme de réadaptation/réhabilitation à base communautaire au profit des déficients visuels, la SHAA oeuvre actuellement dans huit des dix départements du pays grâce à des instructeurs qui interviennent surtout auprès des personnes aveugles ou malvoyantes. Selon le Dr Péan, la SHAA pratique une approche de réhabilitation communautaire, c’est-à-dire de réintégration des handicapés dans leurs milieux naturels et familiaux. « Nous ne pouvons pas prendre en charge tous les aveugles du pays, dit-il. Mais nous avons des instructeurs dans huit départements qui sont en train d’identifier ces personnes dans le but de leur venir en aide.»
Michel Péan en a profité pour saluer le départ de Fritz Georges, l’ancien coordonnateur de la Commission d’adaptation scolaire et d’appui social. « Il a apporté de son vivant une aide importante aux non-voyants », a-t-il confié.
Ayant passé avec succès les examens du baccalauréat deuxième partie, la jeune Stéphanie Lafond veut devenir travailleuse sociale en vue d’aider les non-voyants comme elle, lésés par la société et les autorités, selon ses propos. « Je viens de subir le concours d’entrée à la Faculté des sciences humaines(FASCH), dit-elle. Je veux devenir travailleuse sociale pour aider les autres non-voyants qui ont besoin de l’assistance et de l’encadrement de personnes comme moi. »
Selon elle, Michel Péan a fait un travail louable pour les personnes souffrant d’un handicap. Elle invite l’Etat haïtien à porter une meilleure attention au travail réalisé par le docteur Péan pour les handicapés du pays. «Il a fait beaucoup pour nous malgré ses maigres moyens, nous espérons une meilleure prise en charge de la part de l’Etat haïtien.»
Jean Ernst Théodore, lui aussi aveugle, élève de rhéto, a pour sa part insisté sur la nécessité pour l’Etat haïtien de continuer à supporter les handicapés même après leurs études. « Il y a une déperdition, une fois terminées les études classiques, dit-il. Les handicapés sont rarement acceptés à l’université. Bien souvent, ils sont livrés à eux-mêmes dans une société où ils n’ont pas beaucoup de choix. C’est dommage !»
Claudius Joseph, l’un des non-voyants ayant réussi aux examens du baccalauréat première partie, est fier de son exploit. « Nous avons subi les mêmes examens que les personnes nonhandicapées, dit-il. Cela prouve que nous sommes aussi compétents que les autres. Il faut que nous soyons mieux traités sur le marché du travail !»
Source: Le Nouvelliste