Intégration scolaire des enfants et jeunes handicapés pour une société inclusive: un travail de titan

L’intégration scolaire des enfants et jeunes vivant avec un handicap est depuis quelques temps prise en compte par le Ministère de l’Education Nationale et de la Formation Professionnelle. En dépit des faibles moyens dont dispose l’Etat Haïtien, les efforts conjugués doivent être renforcés pour le respect du droit à l’éducation des enfants handicapés.

A la philo A du lycée Anténor Firmin, ils sont plus d’une centaine d’élèves. Une grande famille, si on croit les confidences de Wed Richy Pierre Noël. « En début d’année, nous avons décidé d’intégrer tous les nouveaux camarades, dit-il. Nous étions tous étonnés de constater qu’il y avait des non-voyants parmi nous mais nous les avons tout de suite aidé à se sentir bien entourés ».

Cet établissement situé à l’Avenue Charles Summer est l’une des institutions scolaires publiques qui reçoivent régulièrement des élèves vivant avec un handicap. Près d’une dizaine de jeunes, majoritairement non-voyants, y sont recueillis pour cette nouvelle année scolaire. Aucune méthode spécialisée n’est utilisée pour leur formation. De leur coté, ils utilisent des outils simples, presqu’ordinaires pouvant leur faciliter l’apprentissage des notions, notamment, magnétophone, machine braille, ou papier de carbone. « Avec le temps, cela devient facile de maitriser les cours avec nos propres moyens », confie Yacinthe St fort, jeune fille devenue non-voyante après avoir été atteinte de myopie dans son jeune âge.

La tolérance et le support de leur camarade, l’encadrement des responsables de l’école ont également été d’un atout considérable dans l’intégration de ces jeunes. Ceux-ci ne cachent pas leur gratitude pour avoir été reçus et acceptés par tout le monde. « Quand je suis arrivé pour la première fois, l’accueil a été chaleureux. Les membres de la direction m’ont tout de suite introduit », raconte Claudius Joseph. Ce jeune capois est non-voyant depuis sa naissance. Il a fait ses études primaires dans des écoles spécialisées. Aujourd’hui, il continue sa course à travers le système régulier.

Gabriel Aladin atteint de Glaucome à l’âge de 14 ans se réjouit surtout de pouvoir reprendre l’école malgré son handicap. « J’ai du arrêter l’école quand ma vision s’est complètement détériorée et que je ne savais comment évoluer avec mon handicap. Je suis content d’être parmi mes camarades, ils ont facilité notre intégration », dit-il.

C’est pourtant une tâche difficile de sensibiliser la population de l’école sur l’intégration de leurs camarades handicapés. Mais, les résultats sont satisfaisants et le message est passé, selon le directeur du Lycée Anténor Firmin depuis 2008, Smith Petit-homme. « C’est un travail de titan mais les résultats valent la peine. Ils développent une camaraderie extraordinaire […] Je suis convaincu que tous les enfants, handicapés ou non, ont les même droits. C’est sur cette base que nous les sensibilisons sur la cohabitation et c’est réussi», complimente M. Petit-Homme.

La scolarisation des enfants en situation de handicap est indipensable pour une participation pleine et entière des personnes handicapées à tous les secteurs de la vie nationale, conformément à la Convention relative aux droits des personnes handicapées des Nations Unies et à la Loi haïtienne du 13 mars 2012 sur l’intégration des personnes handicapées.

Dans ce cadre, un certain nombre d’actions ont été engagées par le Ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle (MENFP) à travers la Commission de l’Adaptation Scolaire et d’Appui Social (CASAS) et le Bureau du Secrétaire d’État à l’Intégration des Personnes Handicapées (BSEIPH) pour promouvoir les orientations inclusives au sein du système éducatif haïtien. « L’intégration scolaire des enfants et des jeunes handicapés dans des écoles ordinaires est désormais au devant de la scène, affirme le Coordonateur par intérim de la CASAS, Joseph Job Maurice. La grande bataille de la CASAS est de rendre effective l’insertion des élèves avec des handicaps légers dans les écoles ordinaires ».

Plus d’une dizaine de jeunes sont intégrés dans des écoles dites régulières pour cette nouvelle année scolaire par la CASAS. D’autres bénéficient de matériels en vue de faciliter leur apprentissage. « Nous n’avons pas les moyens de notre politique », regrette toutefois le coordonnateur ai. Cependant, il promet que la CASAS continuera ses actions pour faciliter la formation des jeunes handicapés.

La lutte pour l’intégration scolaire des enfants handicapés reçoit également le soutient d’autres institutions, notamment, l’Institut national de formation et de recherche pour l’éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés (INS HEA, France). Plus de 400 professionnels en éducation (Inspecteurs, directeurs départementaux, professeurs et membres d’associations de personnes handicapées) ont été sensibilisés à travers le projet « Action de sensibilisation aux orientations inclusives dans l’enseignement », appuyant la politique de l’Etat Haïtien en matière d’éducation spéciale.

Cette série de séminaires dont l’objectif est de sensibiliser les professionnels du domaine sur l’éducation inclusive s’est déroulée de mai à novembre 2013 dans les différents départements du pays. Le Secrétaire d’Etat à l’Intégration des Personnes Handicapées, Gérald Oriol Jr, félicite le support apporté par l’INS HEA et renouvelle la détermination du BSEIPH de poursuivre ses démarches. « Au sein du BSEIPH, nos efforts convergent vers la projection consciente de notre pays dans la direction du développement. Pour ce faire, nous nous acharnons chaque jour dans la lutte pour une meilleure éducation des enfants et jeunes vivant avec un handicap, leur réinsertion sociale, la création d’un environnement adapté, qui garantit leur accès aux bâtiments publics et privés. Ce travail collectif de sensibilisation réalisé au cours de ces cinq derniers mois, de concert avec l’INS HEA et le MENFP, constitue le fruit de ces efforts », a déclaré M. Oriol à la cérémonie de clôture du projet, le mardi 5 novembre 2013 à l’Institut Français d’Haïti.

Reportage vidéo: Emission « Sakapfèt pou Moun Andikape yo », # 41

Bureau du Secrétaire d’État à l’Intégration des Personnes Handicapées